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Corrigé de l'analyse de pub Eristoff

Proposition de corrigé pour la publicité ERISTOFF. Partie « analyse ».

 

(N’hésitez pas à apporter un commentaire)

 

La vodka Eristoff, internationalement vendue, est une boisson géorgienne d’origine russe élaborée selon une recette du 18éme siècle de triple distillation et portant l’aristocratique signature du prince éponyme. Une campagne touchant aussi d’autres pays européens, par annonce presse et si possible affichage, la présente comme « née au pays des loups ».

Quels sont les ressorts psychosociologiques de ce message ? Comment son univers iconographique et culturel est-il susceptible de toucher sa cible ?

Nous verrons, pour répondre à ces questions comment la marque joue à la fois sur le thème de l’authenticité sauvage et sur celui de la transgression.

 

Au premier plan en bas à droite une bouteille de vodka dont les couleurs -le blanc et le bleu- évoquent la glace, la neige, la nuit également présentes dans l’image, comme par un effet de mise en abyme. Cet effet se retrouve d’ailleurs dans la représentation sur la bouteille du loup hurlant à la lune, emblème de la marque qui occupe aussi un panneau de bois au premier plan de la photo. Sur ce panneau, une tête de loup hurle sous un croissant de lune et semble indiquer de manière incertaine la direction d’une contrée lointaine qui n’a pour toute identité que d’être celle des loups. L’image dans son ensemble, représente une forêt où se mêlent neige et brouillard derrière cet improbable panneau de direction indiquant les loups à 500 kilomètres, c'est-à-dire le pays des loups, la Géorgie, dont la signature nous précise qu’elle a vu naître la vodka Eristoff.

Pas d’autres teintes que celles du bleu, dans des nuances du clair au foncé (presque noir) et du blanc, dont une nuance signale l’éclairage de la pleine lune qui préside à ce tableau d’une beauté sauvage, presqu’inquiétante. A ces éléments s’ajoutent les connotations liées à la signature et au texte : la vodka Eristoff est de lignée royale, œuvre du prince Eristoff lui-même, dont le nom complet (Nicolaï Alexandrovitch Eristoff) respire les légendes de l’est…

 

On ne saurait oublier que pour vendre de l’alcool, il faut créer un univers. D’abord parce que l’alcool reste un produit en lui-même dangereux, réprouvé par les morales, mais aussi porteur de mythes ; ensuite parce que le goût, comme le parfum ne se montre pas comme un objet matériel, pas plus qu’on n’en mesure les performances. Créer un univers, c’est donc le/ l’un des buts de ce message qui, pour cela utilise deux axes assez classiques des publicités pour les produits alcoolisés.

 

L’alcool, surtout pour le consommateur français –mais pas seulement- c’est une exigence de qualité qui puise sa source dans l’authenticité des origines et le soin des fabrications. De même que les vins sont supposés être de tradition, les whiskies sont supposés venir de terres sauvages (non conquises etc) la vodka Eristoff vient des terres lointaines où règne/ait le prince du même nom et dont les loups, animaux sauvages et craints sont les habitants et l’emblème.

C’est là la garantie d’une recette qui n’est pas frelatée et qui conserve, le goût de ses origines à la fois aristocratiques (gage de qualité), artisanales (garantie d’unicité). D’ailleurs il s’agit bien d’une « recette » et la « triple distillation » renvoie, comme souvent, dans les publicités pour les alcools à la qualité qui ne saurait s’appuyer que sur le temps.

Un alcool doit être vieux, le temps est son allié, l’isolement vis-à-vis du monde industriel aussi. Ici, on y est : les loups sont nécessairement sur une terre que la neige vierge de l’illustration nous promet comme authentique, la recette vient de loin (1806) et de haut (Le Prince Nicolaï Alexandrovitch) , et le procédé a besoin de temps ; tous les ingrédients d’un alcool de qualité sont livrés de manière presqu’hyperbolique.

 

L’alcool c’est aussi une boisson à laquelle s’attachent des mythes récurrents mais aussi un danger, un interdit. Pour en boire il faut transgresser une règle, et les conditions dans lesquelles on en boit sont toujours un peu transgressives : fête, nuit…C’est une des raisons qui expliquent qu’en face des publicités qui misent sur la qualité, le soin, le temps, on trouve aussi le thème de la fête, de la transgression parfois même de l’immoralité ou de la mise en danger de soi-même. « Ne rentrez pas chez vous ce soir » disait autrefois une marque d’alcool fort, d’autres n’hésitent pas à convoquer le diable ou le goût du pécher pour atteindre ce public plutôt jeune, plutôt masculin, plutôt festif dont toutes les analyses (voir la Francoscopie) disent qu’il a soif de moments festifs et transgressifs, voire de conduite à risques dans un monde du « risque zéro » et du politiquement correct.

Eristoff, malgré les apparences (on voit d’abord le coté contrée sauvage dans le message), ne se prive pas d’utiliser cette piste. La nuit, la piste incertaine et mystérieuse, la pleine lune qui mènent au pays des loups sont aussi celles qui conduisent aux fêtes du prince… c’est un chemin dangereux mais attirant par son danger même… Il agit comme une incitation (presque un défi) à oser l’aventure. Les gens trop sages, ceux que la morale où la religion tiennent éloignés de l’alcool n’entrent pas dans la cible ; on vise donc les autres, ceux qui éprouvent au sortir du travail et des conventions trop établies le besoin d’audace, le besoin de suivre un chemin où tout n’est pas prévu ou formaté.

Ce créneau est appuyé sur un vrai besoin social : plus la société est lisse plus l’envie festive et/ou transgressive est forte. Sur ce thème, le message n’est pas en reste : enfoncez vous dans la nuit au mépris de la prudence et des conventions semble-t-il dire. Cette incitation est renforcée par les connotations attachées de manière diffuses au loup, animal roi des légendes, venu du fond des âges comme synonyme de danger, de période noire mais aussi animal respecté pour son insoumission qu’en son temps La Fontaine soulignait…Etre l’ami des loups c’est prendre soi-même un peu de la liberté, de la beauté sauvage, de la fierté, que cette image des contes et des peurs ancestrales comme enfantines incarne…d’une certaine manière, ne plus avoir peur du loup c’est atteindre une forme de maturité, de virilité. Boire aussi dans les mythes un peu simplistes mais persistants. La boucle est bouclée : n’ayez pas peur du loup, de la nuit, de l’incertain, transgressez les règles de prudence et celles des conventions.

 

Au final, on retiendra que ce message plutôt élégant et soigné sur le plan iconographique, porteur d’une part d’exotisme, parvient à unir les deux voies traditionnelles de la publicité pour les alcools : l’authentique et la transgressive. Aucun de ces deux axes n’est franchement original, le fait de les faire fonctionner ensemble l’est déjà plus. Pour toucher un public sensible au goût mais aussi aux mythes, attiré par l’aventure mais aussi par la transgression festive, c’est une manière de faire qui doit être efficace…

 

X.Baux IFC.

   

 



10/06/2008
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