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A propos de Mme Michu(1)...(texte de N.Chemla pour stratégie)

« Madame Michu » Texte de N.Chemla, directeur des stratégies à TBWA (Stratégies d’avril 2009)

 

 

1. Les publicitaires doivent nécessairement « appréhender la France réelle », voire la « France d’en bas » (selon l’expression est d’un ex-premier ministre) s’ils veulent remplir leur objectifs donc pouvoir lui parler, lui plaire, la faire agir…(ce en quoi consistent bel et bien leur objectifs cognitifs, affectifs, conatifs. Non seulement ils doivent en avoir une idée générale à peu près juste, mais de surcroit ils doivent la connaître dans ses préoccupations triviales et quotidiennes –la lessive à faire, le repas à préparer, les soucis ménagers, les vitres à laver etc…, faute de quoi ils ne l’approcheront pas dans sa pleine réalité.

Cette approche est d’autant plus difficile que les agences de publicités, dirigées par des cadres urbains branchés, appartenant plutôt aux élites économiques et aux milieux à la mode peuvent se trouver assez éloignées de la ménagère moyenne, des classes laborieuses, des soucis de linge, de toilettes, de bricolage ou de papier toilette.

De surcroît, leur métier à la fois créatif et porté à l’interprétation du réel conduit souvent les publicitaires en question, surtout s’ils manquent de d’idées nouvelles, à se retrancher derrière des stéréotypes qui doivent plus au « fantasme » qu’à la précision sociologique. Comment sortir des idées fausses, des illusions, des fantômes (premiers sens du mot fantasme) sur la France profonde lorsqu’on travaille dans un bureau branché au cœur des quartiers branchés des plus grands centres urbains ?

La solution c’est ou cela a été, Madame Michu : la ménagère moyenne, la France de base, la figure représentative des monsieur/madame tout le monde. Elle est, à priori, un bon moyen de revenir au quotidien, au réel. Elle incarne (c'est-à-dire donne vie) à une ménagère que le professionnel connaît mal ou de façon très théorique, elle constitue une image concrète qui va lui permettre de « sortir du fantasme », des illusions ou des mirages de sn bureau parisien. Le problème, surtout dans la France multiple, variée, « communautarisée » d’aujourd’hui c’est qu’elle-même, Madame Michu, n’existe pas, elle est une figure, une construction, un mythe au sens de Barthes, une représentation…donc un fantasme…qui au départ avait vocation à ramener au concret (« à faire sortir du fantasme ») le publicitaire.

La formule de N.Chemla est paradoxale, et même par certains aspects, un peu désespérante : comment parler à la « vraie France » moyenne si la représentation qu’on en fait n’est qu’illusion ? En fait, l’auteur donne ici une idée de l’ambiguïté de la publicité dans son rapport au réel. Pour être crédible, pour être incitative elle ne doit pas trop s’en éloigner et même elle doit s’en approcher au mieux, veiller à un minimum de réalisme voire de trivialité, s’appuyer sur des images suffisamment concrètes, mais elle doit aussi dire aux gens ce qu’ils attendent et dans lequel entre une part de fantasme ou de stéréotype et être consciente que la société dans son ensemble est toujours beaucoup plus compliquée et contradictoire que le monde de la publicité où les mamans sont souriantes même devant un chocolat renversé, les lessives impeccables, les couples unis, la campagne ensoleillée…

 

2. Selon N.Chemla, « Madame Michu, s’est multipliée »… au moins de solides arguments peuvent soutenir ce raisonnement. D’abord Madame Michu s’est multiplié parce qu’en l’espace de cinquante ans elle a libérée ses envies, ses possibilités, ses droits donc varié ses modes de vie.

La ménagère des années 60, en tant que ménagère du moins, avait bien du mal à échapper à une norme sociale très contraignante. Soumise par une loi dans l’esprit patriarcal du code napoléonien, objet de sanctions implicites visant toute forme de conduite novatrice ; elle était donc nécessairement « au foyer » même lorsqu’elle travaillait, nécessairement maman soigneuse et épouse docile, nécessairement incarnation domestique, soucieuse de l’efficacité des javelle ou des savons etc dont, en quelque sorte, elle n’avait pas le droit de se désintéresser…

De surcroît elle vivait dans une société moins métissée, moins mondialisée paradoxalement aussi moins communautarisée. On peut même ajouter moins abondante donc plus fruste sur le plan publicitaire et mercatique.

 On pouvait donc espérer la « moyenniser » sans trop de perte. Les femmes en tant qu’êtres humains, étaient, bien sûr, aussi différentes qu’aujourd’hui mais les ménagères se ressemblaient plus. Elles pouvaient donc être représentées avec moins d’erreurs ou de décalage qu’aujourd’hui.

Désormais la ménagère est multiple, ne peut plus de réduire à un archétype. D’ailleurs la terminologie professionnelle a changé : « la ménagère » peut-être un homme, d’où le fait qu’on la voit sous cette forme dans certains spots pour les aspirateurs ou les produits vaisselles.

Les produits qu’on lui propose sont eux-mêmes multiples dirigés vers des cibles de plus en plus précises, il faut donc qu’on la représente précisément et non plus en gros.

La ménagère s’est aussi multipliée parce ce sont multipliées les influences culinaires, esthétiques, culturelles ; les objectifs personnels et les aléas de la vie : on peut désormais rêver à une carrière professionnelle en même temps qu’une maternité, on peut être célibataire, divorcé, remarié, avec enfants biologiques, famille recomposées, enfants précoces, enfants tardifs etc, ce qui, même lorsque cela existait dans les années soixante, n’était de toute façon pas montré par N.Chemla et ses collègues, car encore considéré comme conformes aux modèles utilisables en publicité.

En synthèse, il y a désormais x offres de plus par rayon et x messages de plus par jour, ce qui implique de chercher plus savamment les cibles mais surtout, on est passé d’une norme à des normes, par goût et/ou obligation, d’un modèle majoritaire à des modèles parallèles. Au final, madame Michu ne peux plus être unique.

XB.IFC



21/09/2011
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